La maladie de Charcot, ou sclérose latérale amyotrophique (SLA), est une maladie neurodégénérative rare et incurable à ce jour, qui attaque les neurones moteurs et compromet progressivement la marche, la parole, la déglutition et la respiration. L’espérance de vie après le diagnostic est généralement de 2 à 5 ans, parfois davantage. Des recherches récentes offrent un nouvel espoir en ciblant des mécanismes moléculaires et cellulaires spécifiques de la forme familiale de la maladie de Charcot.
La maladie de Charcot représente un diagnostic difficile à accepter pour les malades et les familles. Dégénérative, cette affection incurable entraîne une paralysie progressive des muscles, jusqu’à atteindre la déglutition et la respiration, sans pour autant que la conscience soit altérée, dans la plupart des cas. Les personnes atteintes de cette maladie se retrouvent hélas comme “spectateurs de leurs souffrances.” Si de nombreux voiles demeurent sur les causes de cette pathologie grave, une nouvelle étude apporte une lueur d’espoir sur la compréhension des mécanismes qui entraînent la destruction des motoneurones.
Quelles sont les causes de la maladie de Charcot ?
Les causes de la maladie de Charcot ne sont pas connues à ce jour mais l’on distingue deux types de facteurs : la prédisposition héréditaire et certaines causes environnementales comme l’exposition à des produits toxiques et les chocs violents, qui sont des facteurs de la forme sporadique de la maladie. La forme héréditaire de la maladie de Charcot est plutôt rare et concerne environ 10% des cas. Plusieurs gènes et protéines sont mis en cause : TARDBP, VAPB, FUS et C9ORF72, SOD1. Par exemple, dans certaines formes familiales de la SLA, des mutations du gène SOD1 entraînent une malformation de la protéine SOD1, qui perd alors sa capacité à neutraliser les radicaux libres et contribue à la toxicité neuronale.
C’est sur cette piste que se sont penchés des chercheurs américains dont les travaux ont été publiés dans la revue EMBO Molecular Medicine, en étudiant les mécanismes déclencheurs de la forme héréditaire de la maladie.
Comprendre les mécanismes de la forme héréditaire de la maladie de Charcot
La récente étude américaine s’est concentrée sur une mutation du gène VAPB, un déclencheur connu de la maladie de Charcot qui se transmet de manière héréditaire. Le but était tout d’abord de comprendre comment cette mutation affectait les motoneurones.
En analysant les changements moléculaires, l’activité électrique et la réponse à des traitements dans un environnement contrôlé qui imite le système nerveux humain, l’étude a montré que la mutation du gène VAPB altère la communication des différentes parties de la cellule. Cela a pour conséquence directe une perte d’énergie et l’activation continue du système d’alerte de la cellule, une réponse salvatrice en temps normal mais destructrice lorsqu’elle devient chronique. Les neurones moteurs sont alors détruits progressivement. Selon une auteure de l’étude interviewée par Sciences et Avenir, ces résultats apportent un éclairage également pour la forme sporadique de la maladie qui présente des mécanismes communs à la forme héréditaire, tels que “les problèmes de stress cellulaire ou de fonction des mitochondries qui produisent l’énergie dans nos cellules”. Une meilleure compréhension de la forme génétique peut donc apporter de nouvelles pistes pour aborder la maladie dans son ensemble.
Vers une stratégie thérapeutique prometteuse
Au-delà de ces constats fondamentaux sur les mécanismes cellulaires de la forme héréditaire de la SLA, l’étude ouvre également la voie à de nouvelles pistes thérapeutiques. Grâce à un composé capable de bloquer l’hyperactivation du système d’alerte cellulaire dans les cellules détériorées, les chercheurs sont parvenus à restaurer avec succès des aspects essentiels de la fonction des motoneurones dans les cellules porteuses de la mutation VAPB.
Bien que ces résultats soient encore préliminaires et obtenus en laboratoire, ils montrent que certains dysfonctionnements cellulaires liés à la maladie sont potentiellement réversibles. Autrement dit, il serait envisageable, à terme, de développer des traitements capables de ralentir la progression de la maladie, voire de stabiliser certaines fonctions motrices.
Un des axes prometteurs repose également sur l’approche dite de médecine personnalisée : en ciblant précisément les mutations génétiques impliquées chez un patient donné, les traitements pourraient être ajustés de manière spécifique. Cela suppose néanmoins un diagnostic génétique précoce, des analyses approfondies, et surtout, des essais cliniques pour valider l’efficacité et la sécurité des molécules identifiées.
Une avancée pour tous les patients, même dans la forme sporadique
Comme le souligne l’équipe de recherche, les mécanismes étudiés dans la forme héréditaire de la SLA, en particulier ceux liés au stress cellulaire chronique et à la dysfonction des mitochondries, semblent également présents dans la forme sporadique, qui représente la majorité des cas (environ 90%). Ces mécanismes communs laissent espérer que les traitements développés pour la forme familiale pourraient, à terme, bénéficier à tous les patients atteints de la maladie de Charcot, quelle que soit leur origine.
Cette transversalité des approches scientifiques est particulièrement encourageante. Elle permet d’envisager des stratégies thérapeutiques plus larges, reposant sur la correction de mécanismes cellulaires universels dans la maladie. En ce sens, la recherche sur les gènes VAPB, SOD1 ou TARDBP ne bénéficie pas uniquement aux malades présentant une forme génétique, mais à l’ensemble des personnes concernées.
Où en est la recherche clinique aujourd’hui ?
À ce jour, aucun traitement ne permet de guérir la maladie de Charcot. Deux médicaments sont actuellement autorisés en France : le riluzole, qui agit en réduisant la libération du glutamate, un neurotransmetteur potentiellement toxique en excès, et l’edaravone, qui a des effets antioxydants, mais dont les bénéfices restent modérés et limités à certains profils de patients.
De nombreux essais cliniques sont en cours dans le monde, testant des molécules visant notamment à réduire l’inflammation dans le système nerveux, à stabiliser les protéines mutées, à améliorer la fonction mitochondriale et à favoriser la neuroprotection.
Des thérapies géniques et des thérapies à base de cellules souches sont également en développement, même si elles en sont encore à un stade expérimental.
Vivre avec la maladie de Charcot : un accompagnement global
En attendant des traitements plus efficaces, la prise en charge repose avant tout sur un accompagnement pluridisciplinaire. L’objectif est de maintenir la qualité de vie des patients le plus longtemps possible, grâce à un accompagnement global incluant une rééducation motrice et orthophonique régulière, une surveillance respiratoire, une nutrition adaptée et un soutien psychologique pour les malades comme pour les proches.
L’entourage joue également un rôle clé dans le maintien de l’autonomie et l’accompagnement des malades. Par ailleurs, certains dispositifs comme l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA), l’aide humaine ou encore l’aménagement du domicile peuvent être sollicités pour faciliter le quotidien.
Si la maladie de Charcot reste aujourd’hui incurable, les progrès scientifiques récents apportent un espoir réel, notamment grâce à une meilleure compréhension des mécanismes cellulaires impliqués. L’identification des mutations comme celle du gène VAPB permet d’imaginer de nouvelles stratégies thérapeutiques, potentiellement transposables à la majorité des cas.
À travers ces avancées, la recherche avance à petits pas vers des traitements plus ciblés, mieux adaptés, et susceptibles de freiner, voire de stabiliser la progression de la maladie. Pour les patients et leurs familles, cette avancée scientifique constitue une source d’espoir et de mobilisation.
Source : Sciences et Avenir
Ajouter un commentaire