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80 ans de la Sécurité sociale : missions et avenir de la branche autonomie

A l’occasion des 80 ans de la Sécurité Sociale, revenons sur l’origine, la vocation et l’impact de cette institution fondatrice qui accompagne les Français au quotidien face à la maladie , la maternité, la retraite, les accidents du travail et, depuis la création d’une 5ème branche en 2020, face à la perte d’autonomie. Dans un contexte de vieillissement de la population et d’enjeux croissants en matière d’autonomie, cette branche apparaît plus que jamais comme un pilier et un levier pour bâtir la société de demain. 

Sécurité sociale : origine et missions

La Sécurité sociale a été créée le 4 octobre 1945 au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Avant la création d’une 5ème branche dédiée à l’autonomie, elle reposait sur 4 branches essentielles au quotidien des Français : 

  • La branche Maladie gérée par l’Assurance maladie. Elle couvre les frais de santé, les hospitalisations et la maternité. C’est elle qui gère la carte Vitale et les remboursements médicaux.
  • La branche Accidents du travail et maladies professionnelles. Elle protège les salariés contre les risques professionnels et indemnise les victimes.
  • La branche Retraite gérée par la Caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV). Elle suit les salariés tout au long de leur carrière et les aide à préparer leur retraite. 
  • La branche Famille gérée par les Caisses d’Allocations familiales  (CAF). Elle soutient les familles à travers diverses allocations comme les fameuses allocations familiales. 

Ces quatre branches ont longtemps constitué le socle de protection sociale français. Mais le vieillissement démographique et l’évolution des besoins ont rendu nécessaire une cinquième branche.

2020 : l’émergence d’une 5ème branche consacrée à l’autonomie

Le 7 août 2020, la loi relative à la dette sociale et à l’autonomie acte la création d’une cinquième branche de la Sécurité sociale, entièrement dédiée au soutien à l’autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. Elle est officiellement entrée en vigueur le 14 mai 2022 par décret, rendant la cinquième branche opérationnelle à partir de cette date. Avant 2020, la prise en charge de l’autonomie était répartie entre plusieurs acteurs, caractérisée par une fragmentation administrative qui compliquait les démarches. Plusieurs familles confrontées à la dépendance d’un proche renonçaient ainsi à leurs droits.

La cinquième branche a pour but essentiel d’unifier et de renforcer la prise en charge des personnes âgées dépendantes et des personnes en situation de handicap, grâce à un intervenant désormais unique et dédié.

Pilotée par la CNSA, la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, la cinquième branche de la Sécurité sociale fait face aux défis démographiques et sociaux croissants du vieillissement de la population. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : 14,7 millions de Français ont plus de 65 ans en 2024, soit 22% de la population. En 2019, 1,3 million de personnes bénéficiaient de l’Allocation personnalisée d’autonomie (APA), et les prévisions pour 2050 montrent que l’on comptera plus de 4 millions de personnes de plus de 60 ans en perte d’autonomie.

Véritable enjeu de société, la perte d’autonomie ne se limite pas aux aspects physiques. Elle met aussi en avant le poids d’une solitude grandissante. 

Les personnes âgées vivent de plus en plus seules : près de 40% des plus de 75 ans n’ont personne avec qui parler quotidiennement. Cette détresse silencieuse, aggravée par l’éloignement géographique des familles et l’éclatement des structures familiales traditionnelles, pose avec acuité la question du maintien du lien social.

Face à ces enjeux, la création de la branche autonomie a marqué un réel tournant. 

A quoi sert la branche autonomie de la Sécurité sociale ?

Depuis sa création, la branche autonomie pilotée par la CNSA regroupe tous les aspects de la prise en charge de la perte d’autonomie des personnes âgées et/ou en situation de handicap. Parmi ses missions, la cinquième branche gère les dépenses relatives à l’autonomie, que ce soit au travers des aides individuelles ou du financement d’organismes d’accompagnement.

Concrètement, la branche autonomie participe au financement de plusieurs prestations essentielles qui accompagnent les personnes dans leur quotidien. 

  • L’allocation personnalisée d’autonomie (APA), destinée aux personnes de plus de 60 ans en situation de dépendance (Gir 1 à Gir 4). L’APA permet de financer plusieurs types d’aide à domicile et d’adaptation du logement ou de contribuer aux frais d’hébergement en établissement.
  • Pour les personnes en situation de handicap, la branche autonomie gère également la prestation de compensation du handicap (PCH), qui finance les aides humaines, techniques, l’aménagement du logement ou encore l’acquisition d’un véhicule adapté. 
  • L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), soutient les familles dans l’éducation et les soins apportés à leur enfant handicapé. 
  • L’allocation aux adultes handicapés (AAH) garantit un revenu minimum aux personnes dont le handicap limite ou empêche l’activité professionnelle.

La CNSA travaille en étroite collaboration avec les conseils départementaux, les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et les Agences Régionales de Santé (ARS) qui gèrent les demandes, versent les aides aux bénéficiaires et pilotent l’offre médico-sociale sur les territoires. Cette gouvernance partagée vise à garantir une meilleure cohérence entre les parcours de santé et l’accompagnement social, tout en réduisant les disparités territoriales qui existaient avant 2020. Avant la création de cette branche, le taux de bénéficiaires de l’APA à domicile pouvait varier du simple au triple selon les départements, oscillant entre 2,6% et 9,4% et créant de profondes inégalités d’accès aux droits.

Au-delà de ces aides financières directes, la branche autonomie s’engage également dans une mission essentielle de prévention et d’information. Elle finance des actions visant à lutter contre l’isolement des personnes âgées, à prévenir les chutes à domicile, et à retarder autant que possible l’entrée en dépendance. 

Elle a pour mission de financer et coordonner les politiques publiques en faveur des personnes âgées en perte d’autonomie et des personnes en situation de handicap. Elle soutient également le développement de l’offre médico-sociale, en participant au financement des EHPAD, des services d’aide à domicile et des structures d’accueil pour personnes handicapées. 

La 5ème branche reconnaît aussi le rôle essentiel des aidants familiaux en finançant l’assurance vieillesse des aidants (AVA), qui leur permet de valider des trimestres de retraite, ainsi que le droit au répit intégré dans l’APA. 

La création de cette 5ème branche répond ainsi à trois enjeux majeurs identifiés par les pouvoirs publics : 

  • La réduction des inégalités territoriales
  • La simplification du parcours des usagers
  • L’optimisation de l’organisation de l’ensemble du système 

L’objectif principal de la cinquième branche est de garantir à chaque personne en perte d’autonomie, quel que soit son département de résidence, un accès équitable et fluide aux aides et services dont elle a besoin.

Quels sont les moyens de financement de la branche autonomie ?

La branche autonomie mobilise environ 35 milliards d’euros par an et constitue une réponse structurelle au vieillissement démographique et à l’augmentation des besoins d’accompagnement. Face aux projections annoncées d’ici 2050, cette branche représente un dispositif indispensable pour garantir la dignité et la qualité de vie des personnes vulnérables et de leurs proches.

Avec un budget de 42,3 milliards d’euros en 2025, en hausse de 6% par rapport à l’année précédente, la branche autonomie est désormais un pilier majeur de notre protection sociale. 

Son financement repose principalement sur une fraction de 1,93% de la contribution sociale généralisée (CSG), complétée par la contribution de solidarité pour l’autonomie (CSA) et la contribution additionnelle de solidarité pour l’autonomie (CASA). Ces ressources pérennes garantissent une certaine stabilité financière, même si les défis à venir restent considérables face à l’ampleur du vieillissement démographique.

Actualité et défis futurs de la branche autonomie

Malgré ces avancées indéniables, la branche autonomie fait face à des défis considérables qui questionnent sa capacité à tenir ses promesses. La réalité du terrain révèle un système sous tension : en 2025, le déficit de la branche atteindrait 600 millions d’euros, tandis que le déficit global de la Sécurité sociale devrait s’élever à 22,1 milliards d’euros, un niveau historiquement élevé qui met en lumière les difficultés structurelles du système. 

Face à ces contraintes budgétaires, les syndicats et associations de familles dénoncent un manque criant de moyens. Force Ouvrière alerte régulièrement sur le fait que « la cinquième branche de la Sécurité sociale ne doit pas être la cinquième roue du carrosse », pointant notamment le ratio d’encadrement dans les EHPAD, loin d’atteindre celui réclamé depuis des années.

Pour l’avenir, la Convention d’Objectifs et de Gestion (COG) 2022-2026 fixe des ambitions importantes pour la branche autonomie. 

La CNSA s’est engagée sur 40 objectifs structurés autour de trois axes prioritaires. 

Le premier vise à garantir la qualité du service public de l’autonomie en simplifiant les démarches administratives et en créant un guichet unique sur le modèle des MDPH, avec la généralisation progressive des maisons départementales de l’autonomie (MDA). 

Le deuxième axe mise sur la prévention et l’inclusion, en renforçant le « virage domiciliaire » qui permet aux personnes âgées de vieillir chez elles le plus longtemps possible, et en développant l’habitat inclusif. 

Enfin, le troisième axe concerne la modernisation du système d’information et la professionnalisation du secteur, avec 416 millions d’euros sur cinq ans dédiés à la formation des 1,36 million de professionnels de l’autonomie.

L’un des enjeux majeurs reste l’attractivité des métiers du grand âge, confrontés à une pénurie chronique de personnel. Si le gouvernement a annoncé la création de 50 000 emplois d’ici 2027, cet objectif a été repoussé, suscitant la déception des acteurs du secteur. Parallèlement, la branche autonomie intensifie ses efforts en matière de soutien aux aidants familiaux, véritables piliers invisibles du système qui accompagnent quotidiennement près de 4 millions de personnes dépendantes, souvent au détriment de leur propre santé et de leur carrière professionnelle.

Face au vieillissement accéléré de la population, la cinquième branche apparaît plus que jamais comme un pilier essentiel pour bâtir une société véritablement inclusive. Mais sa réussite dépendra de la capacité collective à lui donner les moyens de ses ambitions, dans un contexte budgétaire compliqué où les besoins ne cessent de croître. Comme le soulignent de nombreux experts du secteur, dont Charles Memoune qui développe actuellement des projets innovants d’habitat partagé et inséré, la transformation du modèle de prise en charge de l’autonomie ne fait que commencer. Elle nécessitera à la fois des investissements massifs, une refonte profonde de l’organisation territoriale, et surtout une véritable révolution culturelle dans notre manière de concevoir le vieillissement et l’accompagnement de nos aînés.

Sophie B.

Rédactrice, journaliste presse et web passionnée de lettres et de belles lettres, Sophie dispose d’une grande expérience dans le domaine de la rédaction. A la recherche de la satisfaction des lecteurs, Sophie s’attache à la clarté du sens autant qu’à la beauté du verbe. Un diplôme de Sciences Politiques tout comme une formation d’enseignante lui permettent d’allier justesse, dynamisme et rigueur au service d’un contenu unique et recherché. Elle part sans cesse à la recherche de la réalité du terrain. Ses investigations auprès des publics concernés et les interviews qu’elle mène avec professionnalisme rendent son contenu vivant et instructif. Depuis plusieurs années, Sophie met sa plume et son expertise au service des seniors, afin d’approfondir de manière claire et rigoureuse les thématiques qui les touchent de près.

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