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« Donanemab : un nouveau traitement contre Alzheimer enfin autorisé en Europe »

Après le lecanemab de Eisai, qui avait d’abord été rejeté puis accepté en appel, l’Agence européenne du médicament (CHMP) a donné son feu vert au donanemab du laboratoire Eli Lilly and Company le 25 juillet dernier. Ces traitements contre Alzheimer issus de l’immunothérapie ont montré des résultats prometteurs pour stopper le déclin cognitif aux stades débutants de la maladie. Comment fonctionnent ces médicaments ? Qui peut en bénéficier ?

C’est une nouvelle victoire pour la lutte contre la maladie d’Alzheimer. Depuis quelques années, des traitements d’immunothérapie ont fait leur apparition sur le marché du médicament de plusieurs pays dont les États-Unis, le Japon, et l’Australie. C’est au tour de l’Europe d’accorder son autorisation à la commercialisation de ces traitements prometteurs, avec le lecanemab, dont la mise sur le marché a été validée par la Commission Européenne le 15 avril 2025. Plus récemment, le 25 juillet dernier, le donanemab a été autorisé par le comité scientifique d’évaluation des médicaments pour l’Europe (CHMP) dans l’attente d’une prochaine commercialisation sur le marché européen. 

Qu’est-ce que le donanemab, le nouveau médicament contre Alzheimer autorisé en Europe?

Le donanemab, un anticorps commercialisé sous le nom de kisunla, et le lecanemab ( lequembi), font partie de traitements dits “d’immunothérapie” passive, c’est-à-dire qu’ils reposent sur les défenses immunitaires pour combattre Alzheimer. En effet, on administre par injection intraveineuse des anticorps qui vont cibler les dépôts amyloïdes, l’une des caractéristiques cliniques de la maladie d’Alzheimer. La fixation des anticorps à ces dépôts amyloïdes entraîne une réaction du système immunitaire qui s’active pour les éliminer et “nettoyer” le cerveau. Tant pour le donanemab que pour le lecanemab, les essais ont déjà montré des résultats très prometteurs sur le déclin cognitif lorsque la maladie n’est pas à un stade très avancé. Il s’agit d’une véritable révolution dans le domaine de la recherche scientifique et des traitements contre la maladie d’Alzheimer, qui, jusque-là, visaient les symptômes mais n’étaient pas en mesure de stopper ou de ralentir la destruction des neurones. 

Un espoir concret pour les formes précoces d’Alzheimer

Le donanemab est indiqué pour les patients présentant une forme débutante de la maladie d’Alzheimer, ou un trouble cognitif léger lié à la maladie, au stade où l’efficacité de ce traitement est la plus marquée. En effet, les essais pratiqués avec le donanemab ont montré une réduction des plaques amyloïdes cérébraux de 84 % et un ralentissement du déclin cognitif et fonctionnel de 35 % après 18 mois de traitement. Cette étude randomisée a inclus plus de 1700 patients âgés de 60 à 85 ans, diagnostiqués à un stade précoce de la maladie.

L’effet est d’autant plus notable chez les personnes présentant un faible taux de protéine tau, un autre biomarqueur associé à la progression rapide de la maladie.

Il est important de préciser toutefois que ces traitements ne guérissent pas la maladie mais permettent de ralentir significativement ou même d’inverser son évolution, ce qui représente une avancée majeure. 

Des critères stricts pour un accès encadré

L’administration du donanemab se fait par perfusion intraveineuse, généralement toutes les quatre semaines. Son usage nécessite un suivi médical rigoureux, incluant une imagerie cérébrale (IRM ou TEP) pour détecter la présence de plaques amyloïdes, condition indispensable pour être éligible au traitement.

L’éligibilité au traitement fait l’objet d’examens rigoureux, à la fois pour maximiser son efficacité mais aussi pour en limiter les risques d’effets secondaires possible avec ces traitements d’immunothérapie. 

Ils peuvent en effet entraîner des effets secondaires non négligeables, comme des œdèmes cérébraux (ARIA-E) ou des micro-hémorragies (ARIA-H), en lien avec l’administration d’anticorps monoclonaux anti-amyloïdes. Ces effets ont été signalés dans environ 20 à 25 % des cas selon les études cliniques. Ils nécessitent une surveillance régulière par IRM et peuvent conduire à l’interruption temporaire ou définitive du traitement.

L’Agence européenne du médicament a donc recommandé une utilisation sous conditions strictes du donanemab : dans des centres spécialisés, avec un protocole clair de suivi et d’information au patient. Un plan de gestion des risques accompagnera la mise sur le marché de ce traitement innovant.

Un coût encore incertain et une prise en charge à définir

Aux États-Unis, le donanemab est commercialisé sous le nom Kisunla à un prix avoisinant les 32 000 dollars par an. En Europe, le prix n’a pas encore été fixé. La Commission européenne, en lien avec les autorités de santé nationales, devra déterminer si le traitement pourra être pris en charge partiellement ou totalement par les systèmes d’assurance maladie.

Le coût élevé de ces médicaments suscite des débats, notamment au regard des contraintes d’administration, de diagnostic, et des effets secondaires. Cependant, plusieurs experts estiment que les économies réalisées à long terme, en retardant la perte d’autonomie, l’entrée en institution ou les hospitalisations, pourraient justifier l’investissement.

D’après l’Organisation mondiale de la santé, le coût global de la prise en charge de la maladie d’Alzheimer dans le monde s’élève à plus de 1500 milliards de dollars par an, en tenant compte des dépenses directes et du temps passé par les aidants. Retarder de quelques années l’évolution de la maladie permettrait d’alléger considérablement ce fardeau économique et humain.

L’importance du diagnostic précoce 

Si l’arrivée du donanemab marque une avancée majeure, elle soulève aussi d’autres questions. Seuls les patients à un stade très précoce de la maladie peuvent espérer bénéficier du traitement. Or, la majorité des diagnostics sont encore posés trop tard, souvent lorsque les troubles cognitifs sont déjà installés. La mise sur le marché de ces traitements innovants est donc étroitement liée aux progrès de la recherche scientifique concernant les méthodes de diagnostic précoce, afin de déceler la maladie le plus tôt possible, avant l’apparition des premiers symptômes. D’après la recherche en effet, les signes cliniques d’Alzheimer peuvent être présents des années avant l’apparition des premiers symptômes. 

Selon la Fondation Alzheimer, près de 60 % des cas en France sont diagnostiqués à un stade modéré ou avancé. Le déploiement de ces nouveaux traitements impose donc une transformation en profondeur de l’organisation du dépistage. Il faudra notamment démocratiser les examens biologiques et d’imagerie nécessaires à la confirmation du diagnostic,

former les professionnels de santé au repérage des signes précoces, et soutenir la recherche pour la découverte de nouveaux biomarqueurs de la maladie. Les experts plaident également pour la mise en place de parcours de soins spécifiques, associant traitement médicamenteux, suivi neuropsychologique, accompagnement des aidants et mesures de prévention (activité physique, nutrition, stimulation cognitive).

Vers une nouvelle génération de traitements ciblés

Donanemab et lecanemab représentent la première génération de traitements anti-amyloïdes autorisés en Europe, mais d’autres molécules sont en cours de développement. Certaines ciblent la protéine tau, également impliquée dans la neurodégénérescence, ou cherchent à agir plus en amont sur les mécanismes de l’inflammation et du stress oxydatif. D’après la plupart des scientifiques, la recherche pour Alzheimer se dirige plutôt vers une plurithérapie, afin de prendre en compte les différents aspects de la maladie. 

Parmi les pistes les plus prometteuses : les vaccins thérapeutiques, les thérapies géniques, ou encore les modulateurs de la microglie (cellules immunitaires du cerveau). Des essais cliniques sont actuellement en cours dans le monde entier, avec l’appui de grands centres de recherche publics et privés.

En parallèle, la recherche progresse sur des approches non médicamenteuses complémentaires, comme la neurostimulation (stimulation transcrânienne), les programmes de réadaptation cognitive, ou les interventions environnementales favorisant l’autonomie.

Très active dans la recherche pour la lutte contre la maladie d’Alzheimer, la Fondation Vaincre Alzheimer a investi ces dernières années sur plusieurs projets très innovants dans le domaine du diagnostic précoce.

Une prise en charge globale des malades d’Alzheimer

L’approbation du donanemab en Europe marque un tournant dans la prise en charge des malades d’Alzheimer. Ce second traitement d’immunothérapie autorisé, qui cible les plaques amyloïdes au stade précoce de la maladie, offre une nouvelle chance aux patients de ralentir le déclin cognitif.

Cependant, malgré les avancées remarquables, de nombreuses pistes restent à explorer pour lutter contre la maladie d’Alzheimer, concernant les traitements, le dépistage, la prise en charge des malades ou encore l’accompagnement des aidants. 

L’arrivée du donanemab représente une étape historique, mais elle ne doit pas occulter les enjeux plus larges liés à la maladie d’Alzheimer. Le vieillissement de la population en Europe rend urgente la construction d’une « société du bien vieillir », qui intègre pleinement les besoins des personnes vivant avec des troubles cognitifs et doit mettre l’accent sur un soutien renforcé aux aidants, l’adaptation des lieux de vie, l’inclusion sociale et la lutte contre la stigmatisation et l’isolement. 

Sophie B.

Rédactrice, journaliste presse et web passionnée de lettres et de belles lettres, Sophie dispose d’une grande expérience dans le domaine de la rédaction. A la recherche de la satisfaction des lecteurs, Sophie s’attache à la clarté du sens autant qu’à la beauté du verbe. Un diplôme de Sciences Politiques tout comme une formation d’enseignante lui permettent d’allier justesse, dynamisme et rigueur au service d’un contenu unique et recherché. Elle part sans cesse à la recherche de la réalité du terrain. Ses investigations auprès des publics concernés et les interviews qu’elle mène avec professionnalisme rendent son contenu vivant et instructif. Depuis plusieurs années, Sophie met sa plume et son expertise au service des seniors, afin d’approfondir de manière claire et rigoureuse les thématiques qui les touchent de près.

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